L’art de s’accrocher à ce qui n’existe plus et de disparaître avec
        
        
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          Car de quelles autres options disposeront enfin les États-Unis demain ?
        
        
          Laisser filer l’inflation ? Dévaluer massivement le dollar ? Accepter par
        
        
          conséquent de voir flamber les prix et diviser par deux ou quatre leur
        
        
          pouvoir d’achat ? Abandonner l’usage courant de l’automobile et de
        
        
          l’avion ? Raser leurs villes pour les reconstruire entièrement à l’euro-
        
        
          péenne avec un maillage dense de transports en communs ? Troquer
        
        
          leurs pelouses bien tondues, leurs luxueuses villas, leurs jacuzzis chauffés
        
        
          toute l’année contre des logements exigus à énergie positive (et parfois
        
        
          même dépourvus d’ascenseur) ? Il est possible que peu de choses dans
        
        
          leur culture et leur système éducatif les aient préparés à cela.
        
        
          À une échelle plus large encore, il semble que peu à peu se réunissent
        
        
          toutes les conditions nécessaires et suffisantes à unméga conflit mondial :
        
        
          l’insuffisance des ressources en hydrocarbures, en eau douce, en terre fer-
        
        
          tile, en air non pollué, en climat agréable ; l’explosion démographique des
        
        
          pays pauvres ; les famines prévisibles et les migrations de masse qu’elles
        
        
          ne vont pas manquer de provoquer.
        
        
          Mais d’autre part, il semble tout aussi bien que la guerre soit devenue un
        
        
          jeu bien trop dangereux pour être encore joué : une journée bien remplie
        
        
          suffirait à exterminer la totalité de notre espèce (et accessoirement d’un
        
        
          certain nombre d’autres espèces animales ou végétales, même protégées
        
        
          par l’UNESCO).
        
        
          Alors comment synthétiser l’impossibilité de faire la guerre à la Chine, de
        
        
          laquelle les États-Unis sont vitalement dépendants, et l’obligation pour
        
        
          eux de faire la guerre à la Chine, qui les implique dans une relation de
        
        
          dépendance insupportable ?
        
        
          Il se pourrait qu’une solution créative résidât dans la réinvention du
        
        
          concept même de guerre.
        
        
          Pendant longtemps, qui disaitguerre induisaitdesnotions napoléoniennes
        
        
          de conflits de frontières, d’armées qui se déplacent avec tout un
        
        
          cortège de chevaux, de canons ou de chars. Plus tard, qui disait guerre
        
        
          induisait des images de tranchées pleines de boue, où de temps en temps
        
        
          des peuples entiers venaient se trucider à la baïonnette, poitrail contre
        
        
          poitrail, toujours pour une frontière. Qui disait guerre au fond induisait
        
        
          nécessairement des notions assez simples de frontières, de nation ou
        
        
          d’armée.
        
        
          Tout cela appartient désormais au passé.