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          D
        
        
          ictionnaire
        
        
          des mots
        
        
          en
        
        
          voie
        
        
          de
        
        
          disparition
        
        
          On pourrait donc rêver à une nouvelle forme de démocratie, la
        
        
          « démocratie universelle » qui compenserait l’absence de liens directs
        
        
          par de l’électronique : vote à distance, forums de toutes sortes, sondages
        
        
          en temps réel pour prendre le pouls de l’opinion sur tous les sujets à la
        
        
          mode. La démocratie universelle est inévitablement mondialiste car les
        
        
          frontières n’existent plus. Elle sort également du cadre étroit du temps
        
        
          présent car les problèmes écologiques impliquent un droit de parole
        
        
          donné enfin aux générations futures : changement climatique, empoi-
        
        
          sonnement des sols, destruction massive des espèces, endettement
        
        
          colossal. Mais ce genre de démocratie risque de se noyer dans elle-
        
        
          même : la responsabilité individuelle s’y dissout comme de l’aspirine dans
        
        
          un verre d’eau.
        
        
          À l’utopie de la démocratie universelle répond le mirage des dictatures
        
        
          exotiques. Le potentat local est particulièrement doué pour calmer les
        
        
          angoisses des ennemis de l’incertitude : il prône le retour à l’ordre d’autre-
        
        
          fois, aux valeurs rassurantes (Travail, Famille, Patrie), la lutte d’une culture
        
        
          originale contre l’impérialisme (Astérix au Québec ?). Plus le changement
        
        
          est global ou rapide (or le changement est de plus en plus rapide et
        
        
          de plus en plus global), plus la tentation totalitaire s’impose aux foules
        
        
          comme la réponse simple et évidente à l’inconfort de la déstabilisation.
        
        
          Nous approchons du point de rupture en matière démographique,
        
        
          énergétique, écologique si bien que les renversements de tendance vont
        
        
          induire des changements sans précédents quantitativement et qualitati-
        
        
          vement. La globalisation du désarroi ouvre les portes de la dictature.
        
        
          Dans l’avenir, les dictatures locales continueront, comme par le passé, à
        
        
          se heurter à la logique universelle de la démocratie et cela provoquera
        
        
          bien des turbulences. Entre les deux s’introduira sans doute un modèle
        
        
          de synthèse que vous pourriez qualifier d’« oligarchie anonyme ». On
        
        
          peut même se demander si ce modèle n’est pas déjà à l’œuvre aux États-
        
        
          Unis, en France et dans la plupart des grands pays, à l’exception notable
        
        
          de la Chine. L’oligarchie anonyme dépose le pouvoir réel entre les mains
        
        
          des entreprises et plus particulièrement des multinationales les plus
        
        
          puissantes. Un président est démocratiquement élu mais en réalité ce
        
        
          président n’est qu’une marionnette, un personnage élégant, séduisant et
        
        
          même charismatique : il est téléguidé dans l’ombre par les décisionnaires
        
        
          de l’Économie qui se sont accordés sur la politique la plus en phase avec
        
        
          leurs intérêts dans la compréhension intelligente d’une réalité mondiale,
        
        
          qu’elle soit démographique, environnementale ou culturelle. De même
        
        
          qu’à Athènes, le soi-disant modèle de la démocratie n’impliquait en