L'art de se faire des ennemis - page 134

dance réciproque est à peu près équilibré. Les choses se
gâtent dès que l'un des deux protagonistes devient, pour
une raison ou pour une autre, un peu plus dépendant
que l'autre. Il s'accroche. L'autre s'éloigne. Le premier
se raccroche encore plus. L'autre se réloigne davantage.
Et l'on se retrouve dans le scénario hyperfréquent de
l’abandonnique, du mal-aimé martyrisé en dépit de tout
son amour. Rien ne fait fuir davantage que l’aspirateur à
tendresse.
Il y a donc ici encore deux stratégies possibles pour
qui souhaite retrouver la grande sérénité des soirées
solitaires :
La première consiste à rester glacial, indiffé-
rent, absent à l’égard de ceux qui manifestement
cherchent à nous plaire.
La deuxième consiste à se montrer épouvanta-
blement collant.
Huit heures du matin : c’est le premier coup de téléphone
au domicile de la nouvelle standardiste de l’entreprise.
—Comment avez-vous trouvé mon numéro de téléphone ?
— Je l’ai trouvé dans l’annuaire. Voulez-vous dîner avec
moi ce midi à la cafétéria ?
— Vous savez bien que de toute façon nous nous y
retrouverons d’office.
— Oui, mais je veux être sûr d’avoir une place à côté de
vous, pour respirer vos phéromones, entendre votre
cœur battre.
— Excusez-moi d’interrompre cette conversation, mais je
vais être en retard.
Huit heures et quart. Deuxième coup de fil.
— C’est encore vous ?
L’art de se faire des ennemis
132
1...,124,125,126,127,128,129,130,131,132,133 135,136,137,138,139,140,141,142,143,144,...204
Powered by FlippingBook