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          D
        
        
          ictionnaire
        
        
          des mots
        
        
          en
        
        
          voie
        
        
          de
        
        
          disparition
        
        
          Google), un site de vente de livres d’occasion (comme Chapitre.com) ou
        
        
          une bibliothèque municipale, autant il est de plus en plus difficile de
        
        
          pouvoir se concentrer sur la lecture complète d’un livre de la première
        
        
          à la dernière page sans être dérangé par des obligations professionnelles,
        
        
          les sollicitations de votre iPhone ou de votre Blackberry ou par l’arrivée
        
        
          intempestived’une offre publicitaire dans votre boîte de réception (ou
        
        
          sur votre implant cérébral).
        
        
          Ce qui prend au fil du temps de la valeur, ce ne sont donc plus les lieux
        
        
          où l’information est disponible mais ceux où elle ne l’est pas : un déplace-
        
        
          ment s’opère de la Culture de l’Abondance à la Culture du Vide.
        
        
          L’avenir de la bibliothèque est à l’aménagement d’un temps de lecture sé-
        
        
          rieusement protégé de toutes les turbulences extérieures. On peut ainsi
        
        
          imaginer, de manière idéale, des centres de retraite éloignés des grandes
        
        
          villes et qui ressemblent aux monastères d’autrefois. On y réside le temps
        
        
          de son séjour dans une petite cellule bien éclairée et silencieuse, pour-
        
        
          vue d’un mobilier minimal : un lit, une table, une chaise, une lampe de
        
        
          bureau. Les prises de repas y sont faciles mais flexibles. Les promenades
        
        
          solitaires dans un jardin ou sous les arbres y sont possibles à n’importe
        
        
          quelle heure. Le téléphone et la télévision n’y sont pas plus autorisés que
        
        
          les visites. Les échanges avec l’extérieur ne peuvent s’y faire que par e-mail
        
        
          et à certaines plages horaires prédéfinies par l’usager.
        
        
          On peut également imaginer à proximité de votre domicile, l’aménage-
        
        
          ment d’une cellule monacale de concentration, lumineuse, climatisée,
        
        
          insonorisée, déconnectée de tous les bruits du monde.
        
        
          Pour ceux qui n’ont pas les moyens de s’offrir une retraite zen ou un
        
        
          bunker privé, un commerce nouveau fleurira peut-être également aux
        
        
          antipodes du cybercafé collectif : le « café isoloir » qui offrira aux ama-
        
        
          teurs de recueillement de petites alvéoles silencieuses à la façon de nos
        
        
          églises d’autrefois.
        
        
          Enfin, dans les écoles, dans les universités ou dans les centres de forma-
        
        
          tion, des « points de recentrage » seront organisés afin de permettre
        
        
          aux étudiants de switcher un moment du mode absorption au mode
        
        
          réflexion.
        
        
          La valeur ajoutée des bibliothèques du futur se situera donc dans leur
        
        
          capacité de soustraction aux tentations, aux invitations, et aux turbulences
        
        
          du monde.