L'art de se faire des ennemis - page 159

et de saboter ses relations de couple
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Le grand secret des conversations amoureuses, c’est de
ne jamais y parler d’amour et surtout pas de son amour
pour l’autre.
Éviter d’une manière générale la familiarité, même
avec les êtres que vous connaissez le mieux.
Tout rayon de lumière fait disparaître bien des ombres.
Sans masque, l’autre perd vite une partie de son
« altérité », de son prestige d’être un « Autre », de la
charge de magie dont il est encore un peu porteur.
L’ennui, comme la nuit en Afrique, tombe toujours
plus vite qu’on ne s’y attendait. Plus une relation s’inten-
sifie sur le plan du fond, plus la distance est nécessaire
sur le plan de la forme.
Préférer donc d’une manière générale le « Vous » au
« Tu ».
Le «
Vous
» est un gage d’éternité. Le «
Tu
» tue la relation.
Sur le plan du fond, il est bien clair qu’une relation
s’épuise prématurément quand on appuie trop fort — et
trop vite — sur l’accélérateur. La même grosse bûche
peut nourrir une flambée étincelante pendant une demi-
heure ou vous chauffer à feu doux pendant toute la nuit.
Aucun être ne peut donner à un autre être
tout
pour
tou-
jours
. C’est là l’un des plus gros mensonges de la
littérature et des marchands de rêve. Alors il faut choisir
entre « Donner tout pour quelque temps » ou « Donner
quelque chose pour toujours ».
C’est là toute la différence entre «
être amoureux
» et
«
aimer
». Quand vous êtes amoureux, l’identité de
l’autre n’a pas réellement d’importance. À la limite, elle
vous encombre. Vous projetez, en un clin d’œil, sur un
quidam qui n’a rien demandé, votre système d’attentes,
vos blessures d’enfant, vos maladies mentales. Ce jeu de
projection lui donne, d’une seconde à la suivante, une
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