L'art de perdre son temps - page 112

passer à l’étape du traitement de l’information, il est
indispensable de charger dans la RAM, en « mémoire
vive », tous les logiciels et les fichiers nécessaires, c’est-à-
dire, pour reprendre un langage plus traditionnel, d’aller
chercher dans la bibliothèque ou les armoires tous les
documents nécessaires à la tâche, puis les ouvrir à la
bonne page sur la table de travail. Cela peut prendre un
certain temps, mais c’est incontournable.
Or, il se trouve que cette étape est à refaire chaque fois
qu’on a été interrompu et que la fine pointe du cône de
l’extrême attention a été sollicitée de force par un agent
extérieur.
Cela explique les confessions d’un grand nombre de
cadres qui reconnaissent que le meilleur de leur travail se
fait ou le soir, quand tout le monde est parti, ou le week-
end à la maison. Interrompus dix fois par jour dans le
traitement d’un dossier important, toute leur énergie de
la journée s’évapore à se remettre dix fois dans le bain du
dossier et à charger une fois de plus en mémoire vive les
informations nécessaires, ce qui est en outre épuisant.
On peut faciliter la mémorisation de ce phénomène par
une image :
L’efficacité d’un travail croît avec le carré du temps qu’on lui
consacre sans interruption.
Ce qui donne un résultat de 1 pour 1 heure de travail, de
4 pour 2 heures, de 16 pour 4 heures, etc.
En fait cette image est inexacte. D’abord parce qu’elle
suppose que l’efficacité d’un travail soit objectivement
mesurable, mais surtout parce qu’il y a bien un moment
de fatigue où la productivité se met au contraire à
décroître.
Ce qui est sûr, c’est qu’on peut manger un éléphant à
condition de n’en manger qu’un peu chaque jour, mais
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